A Paris, plus de 66% de parisiennes et parisiens ne se sont pas rendus aux urnes. Le bilan des dernières élections est inquiétant. L’abstention a atteint des sommets.
Pourquoi ? Qu’est-ce qu’il se passe ?
Je suis élue du 18e, et ce que l’on constate, c’est que ce sont dans les quartiers les plus populaires que les taux d’abstentions explosent. La crise démocratique à laquelle on assiste, c’est celle de la perte d’espoir et de confiance des plus pauvres.
J’ai souvent cette phrase d’Edouard Louis en tête – je la cite : « Ça aussi c’est étrange, c’est eux (les dominants) qui la font la politique alors que la politique n’a presque aucun effet sur leur vie. Pour les dominants, le plus souvent, la politique est une question esthétique : une manière de se penser, une manière de voir le monde. Pour nous c’était vivre ou mourir ».
Il a raison. Quand on est issu des classes les plus populaires, on a l’impression que celles et ceux qui font de la politique sont à la cour de récré, qu’ils n’en ont rien à faire des problèmes des petites gens. On a l’impression que de toute façon, on ne sera jamais écoutés, jamais compris, que tout ça, la politique, ça ne sert à rien, que rien ne changera jamais. C’est dans le dépit que l’abstention fait son lit.
Vous le savez, avec mon groupe, nous soutenons l’idée d’une participation citoyenne. Mais, force est de constater que ce sont toujours les mêmes que l’on retrouve : les gens disposant d’un certain bagage culturel et social, qui ont fait des études, qui n’ont pas peur de s’exprimer en public, beaucoup d’hommes… Mais c’est gens-là – même si on est ravis qu’ils s’investissent – il faut bien le dire : on les écoute déjà assez, ce sont eux qu’on entend dans le débat public. Ce ne sont pas eux le public visé par les dispositifs de participation citoyenne. Où sont les femmes, les immigrés, les jeunes des quartiers, les personnes très isolées,… toutes ces personnes qui ne se sentent pas socialement légitimes à s’exprimer, qui n’osent pas ou qui n’espèrent plus ?
C’est pourquoi, si les motivations qui animent la création de l’Assemblée citoyenne sont louables, et partagées par notre groupe, nous nous interrogeons : est-ce qu’on va vraiment régler ces problèmes avec une nouvelle instance ? Ne faudrait-il pas faire le bilan de l’existant et, ensuite, construire une solution globale en fonction ?
Comment faire de la participation citoyenne et notamment, pourquoi pas, de cette nouvelle instance, un outil concret de re-conquête de l’esprit démocratique, un outil pour être plus proche de la population, pour l’écouter, pour qu’elle se sente respectée, et agir concrètement dans la vie de tous les jours de ces personnes qui se sentent si délaissées, si impuissante ? En somme, un outil au service du peuple parisien.
Madame la maire,
- Comment allons-nous, dans cette perspective, coordonner les travaux, en dresser le bilan et faire le lien entre leurs membres, pour faciliter les échanges et travailler pour renforcer la démocratie participative, et même de la démocratie tout court ?
- Allons-nous réaliser un état des lieux des dispositifs de démocratie participative à Paris, recenser les différentes instances, avant de nous lancer dans un nouveau dispositif ? Plus que jamais, il nous faut aller vers les publics isolés, leur dire qu’elles et ils ne sont pas seuls, qu’elles et ils comptent, qu’elles et ils sont légitimes à s’exprimer, qu’elles et ils font pleinement partie de cette société autant que n’importe qui d’autres.
Je vous remercie