Pendant près de 50 ans, les parisiens ont été coupés de la Seine par les autoroutes urbaines en bord de fleuve et par la société du tout voiture. Notre majorité de gauche a permis aux parisiens de se rapprocher de la Seine par la piétonnisation des voies sur berges. Et ce, rappelons-le, malgré l’opposition constante de la droite qui nous a emmenés jusqu’au Tribunal pour cette raison.
Notre majorité de gauche a aussi permis de mettre en œuvre la dépollution de notre fleuve. Et ce, bis repetita, avec l’opposition de la droite parisienne. Je pense notamment à Me Dati qui se moquait de notre choix d’investir 1.4 milliard en prétendant que la Seine ne serait jamais baignable. Nous l’avons pourtant fait, démontrant une fois de plus qu’on ne peut compter ni sur la clairvoyance ni sur l’ambition écologique de Me Dati.
Coup double, la dépollution de la Seine va nous permettre aussi une réappropriation durable du fleuve avec l’ouverture de 3 sites de baignades. Qui seront des lieux qui augmenteront la qualité de vie, et apporteront le rafraichissement en temps de canicule. Fait notable, notre action pour la dépollution de la Seine permet à la biodiversité de se développer. 36 espèces de poissons sont présentes aujourd’hui dans la Seine, quand elles étaient moins de 10 dans les années 70.
Notre action démontre donc chaque jour qu’il est possible d’agir, efficacement, pour l’environnement quand on s’en donne les moyens. Pour la Seine, comme pour d’autres milieux. Pourtant, nous sommes surpris cette volonté d’accorder la citoyenneté d’honneur à la Seine. Une citoyenneté d’honneur est un titre honorifique. Qui vise à reconnaître et souligner des mérites exceptionnels, à remercier d’une action au service des autres, à exprimer un soutien à une lutte pour les droits humains et les libertés fondamentales.
La citoyenneté d’honneur à Paris a permis d’honorer ou protéger Nelson Mandela, Lula, Masha Amini, Paul Watson, et nous espérons bientôt, les civils palestiniens. Gare à ne pas amoindrir sa visée première qui concerne les combats de ces humains partout dans le monde.
Par ailleurs, en septembre 2016, nous avions attribué la citoyenneté d’honneur à la biodiversité. Serais-je taquin, en demandant ce qu’en tant que tel, la citoyenneté a permis pour la biodiversité ? Les leviers juridiques pour protéger la Seine, existent déjà. Il y a la charte de l’environnement, qui peut être améliorée bien sûr. Il y a le code de l’environnement.
Dans ses articles L.210-1 et suivants, offre déjà une protection étendue des eaux et milieux aquatiques. Il reconnaît l’eau comme « patrimoine commun de la nation » et établit un régime juridique complet. Il y a donc déjà un cadre existant qui permet de défendre l’intérêt de la Seine devant les juridictions. Mais le levier pour protéger la Seine (comme sur de nombreux sujets), ce n’est pas d’agir en aval.
Mais bel et bien de légiférer, de réglementer en amont par des changements économiques fondamentaux. Et en donnant aussi les moyens aux agences de régulation, de contrôle et d’inspection. Pour empêcher à la source le rejet d’eaux polluées, l’artificialisation des berges, l’édification de barrages l’empêchant les bons écoulements... Le long de la Seine, on retrouve de nombreuses industries automobiles, pétrochimiques, des centrales thermiques, mais aussi des champs massivement pollués. Ce sont ces activités économiques qu’il faut encadrer à la source.
Prenons l’exemple des PFAS. Nous savons que la dépollution aux PFAS est un chantier herculéen. Seule leur interdiction à la racine peut résoudre le problème. Ce qui suppose de peser démocratiquement sur l’économie. Bref de questionner le capitalisme.
La préservation de la biodiversité et de la Seine sont incompatibles avec les logiques du capitalisme qui est aveugle et n’envisage notre environnement que comme source de bénéfices au mépris même de la viabilité de notre écosystème.
Les multinationales et les grandes industries s’organisent en lobby pour continuer à utiliser des pesticides, des polluants éternels, allant jusqu’à financer de fausses études pour retarder l’action publique. Là encore il faut s’attaquer à la source du problème.
Dès lors, nous ne nous opposons pas fondamentalement à cette délibération et nous voterons pour. Mais nous appelons à pousser l’action aux racines des problèmes.
Je citerai Kohai Saito pour conclure mon propos dans son dernier livre Moins. Pour lui, « Les politiques qui s’attaquent au changement climatique ne pourront pas éviter les conflits avec le capital et la réalisation de ces politiques ne passera pas sans le fort soutien de mouvements sociaux. » Son propos est bien sûr pleinement valable pour la question de la Seine. Je vous remercie.