Il y a une constante depuis l’arrivée de Monsieur Macron au pouvoir en 2017 : les riches deviennent plus riches, le nombre de pauvres augmente et la précarité explose. Il y a quelques semaines, le couperet est tombé et, il vient de son propre camp. Le comité chargé d’évaluer les réformes de la fiscalité du capital mis en place en décembre 2018 par le Président lui-même conclut que la baisse de la taxation des revenus du capital n’a eu aucun effet positif sur l’économie, sauf une explosion des inégalités ainsi qu’une hausse significative des dividendes et un enrichissement colossal des très aisés. En somme, des riches plus riches, des pauvres, plus pauvres.
Comme si cela ne suffisait pas, cette confiscation du revenu du capital s’ajoute à une baisse des dotations et une suppression des recettes fiscales de collectivités qui doivent agir dans un cadre budgétaire de plus en plus contraint alors qu’elles sont confrontées à une forte augmentation des besoins sociaux de leurs usagers et à un fort besoin d’investissement pour engager une transition énergétique indispensable. Nombre collectivités ont été contraintes d’imposer une réduction de l’offre de services publics.
Et n’en déplaise à notre opposition, les alarmes en la matière viennent aussi de vos propres camps. Mes chers collègues, entendez David Lisnard, président de l’AMF très sévère à l’égard de l’exécutif et du mouvement de recentralisation que l’État a choisi d’entamer. Écoutez François Sauvadet, président de Départements de France, qui regrette que « l’État charge encore leurs dépenses en faisant mine d’ignorer que les ressources des départements dégringolent ! ». Tous les deux dénoncent une situation financière et budgétaire qui n’est plus tenable pour les collectivités territoriales les plus proches des administrés. Pourtant l’urgence sociale est de plus en plus prégnante. Le directeur de l’INSEE lui-même confirme une hausse de la pauvreté. Il souligne que le taux de privation n’a jamais été aussi haut que près de la moitié des personnes se déclarant en situation de privation vit au-dessus du seuil de pauvreté. Quant au Credoc, le Centre de recherche pour l’étude et l’observation des conditions de vie, il estime qu’un français sur six ne mange pas à sa faim.
Sans oublier un contexte de crise devenu quasi structurel tant elles se succèdent : sanitaire, internationale, énergétique… Crise auxquelles s’ajoute, cette année, une crise immobilière marquée par un accès aux crédits immobiliers devenu quasi impossible qui paralyse le marché immobilier.
Ceci est d’autant plus inquiétant que l’inflation qui stagnait voire fléchissait sur certains secteurs pourrait repartir à la hausse entre autre à cause de la crise au proche orient. La baisse du pouvoir d’achat est devenue une réalité pour tout le monde y compris les cadres qui jusque-là était relativement épargné. La Ville subit les manœuvres d’un gouvernement prompt à supprimer tous les impôts et pour ce qui concerne la ville de Paris à assécher sa DGF qui cette année encore est nulle (0 euros !). Tout ceci vise à asphyxier les collectivités et alimente un discours « anti-impôt » très dangereux. Or l’impôt est au cœur du contrat social : décider qui doit contribuer, comment, à quel montant, pour quelles finalités est le pilier de notre démocratie parlementaire. Les suppressions de la CVAE et de la taxe d’habitation ont créé une fracture majeure dans le rapport de nos concitoyens au consentement à l’impôt, au service public et aux collectivités. En un mot la démocratie locale.
Cette raréfaction des ressources fiscales locales et nationales a poussé les collectivités à activer le dernier levier restant : la hausse de la taxe foncière qui était la plus basse de France. Hausse qui nous est par la suite reprochée au nom d’une soi-disant incompétence en matière de gestion budgétaire ; reproche qui devrait se traduire, pour certains ici et ailleurs, par une mise sous tutelle de notre collectivité.
La réalité c’est que cette recentralisation, qui ne dit pas son nom, affaiblit notre démocratie locale, fragilise les services publics rendus aux citoyennes et citoyen, donc l’égalité républicaine. Et surtout elle délégitime les représentants locaux élus démocratiquement au profit de gestionnaires d’État. Elle délégitime des élus locaux contraints d’activer le seul levier qui leur reste, la taxe foncière, aggravant plus encore les inégalités territoriales. Là où l’État intervenait historiquement en tant que planificateur et redistributeur des richesses pour lisser les inégalités, il a choisi d’entrainer les territoires dans une logique de concurrence et d’appel à projets. C’est inadmissible.
On serait tentés de penser que ces suppressions d’impôts et cette recentralisation sont cohérentes avec les nombreuses dérives autoritaires des gouvernements Macron et de son ministre de l’intérieur Gérald Darmanin, pointés du doigt à de nombreuses reprises par différents organismes européens et internationaux.
Mes chers collègues, à cette paupérisation des collectivités orchestrée par l’État, s’ajoute cette année l’effondrement des DMTO de plus de 300 millions d’euros dont 200 millions sont entérinées par la décision modificative que nous nous apprêtons à voter. Le Département du Val de Marne, dirigé par la droite, ne fait d’ailleurs pas mieux et doit lui aussi augmenter son recours à l’emprunt pour affronter cette chute. La situation actuelle prouve à quel point nous avions raison de dénoncer la volatilité de ces frais de notaires et notre dépendance aux aléas du marché de l’immobilier sur lequel nous n’avons pas la main.
Pour éviter ce type de dépendance fiscale, notre groupe a toujours été porteur de nouvelles recettes fiscales locales comme ce fut le cas à l’occasion du rapport sur l’avenir des finances locales présenté par Nicolas Bonnet et Paul Simondon. Le vœu que nous présentons va dans ce sens sans jamais grever le pouvoir d’achat des classes moyennes et des classes populaires. Toutes leurs propositions restent d’actualité et doivent être mises en place de manière urgente sauf à vouloir étrangler définitivement les collectivités. C es propsoitions, vous les connaissez, elles reviennent sur la taxe de séjour sur les palaces et les meublés touristiques, sur une taxe sur les bureaux vacants, sur la taxe d’habitation sur les résidences secondaires (THRS) ; sur la taxe sur les logements vacants en la multipliant par au moins quatre ; ou encore l’annulation la suppression scandaleuse de la CVAE….
Elles seront d’ailleurs présentées au sénat par mon collègue Ian Brossat dans le cadre de l’examen du projet de loi de finances 2024.
Le tableau que je viens de dépeindre et dans lequel s’inscrit notre débat est d’une grande morosité et laisse peu de place à l’espoir. Pourtant dans ce contexte particulièrement contraint et difficile, nous réussissons à maintenir un haut niveau de politiques publiques. Nous continuons d’investir massivement pour le logement et la transition énergétique. Nous contribuons à construire une réponse à l’urgence sociale que l’État ignore. Évidemment, au groupe communiste, nous serons toujours porteurs de propositions pour un service public encore renforcé et nous serons au rendez-vous en décembre lors du débat budgétaire pour rappeler nos priorités.
Côté fonctionnement. Les orientations qui sont d’ores et déjà inscrites dans ce document vont dans le sens d’un appui au pouvoir d’achat des parisiens et des besoins sociaux des plus précaires. La ville a su créer les outils pour que les usagers puissent affronter les hausses des prix des fluides, de l’énergie et des denrées alimentaires. Elle a su se mobiliser pour les usagers des cantines, des piscines, des écoles, des Ehpad… pour tous ces services publics municipaux qui sont au cœur du quotidien des Parisiens, en particulier celles et ceux des quartiers populaires.
Je pense au maintien de la gratuité des transports pour les moins de 18 ans ou les séniors alors que la droite régionale et le gouvernement macroniste s’apprête à augmenter, main dans la main avec le ministre des transports, le pass Navigo pour le 3 prochaine années. Je pense également au maintien des tarifs de cantine qui dans le contexte actuel est une preuve à la fois de bonne gestion financière et de volontarisme politique. Comme elle sait également être aux côtés de celles et ceux, de plus en plus nombreux, qui sont en situation de rue quand l’Etat a choisi de leur tourner le dos.
En matière d’investissement, je réaffirme ici notre souhait d’un compte foncier ambitieux, à la hauteur de notre Plan d’accélération d’investissement municipal (PAIM), des attentes engendrées par le PLU bioclimatique et sans aucun doute des exigences de notre futur Plan Climat. Pour que cela soit mis en œuvre rapidement, il est urgent de sanctuariser dès maintenant des enveloppes budgétaires dédiées et à la hauteur des ambitions que nous nous sommes collectivement fixées. Pour ce qui est de l’action foncière pour le logement, une enveloppe annuelle de 400 millions d’euros est indispensable, à répartir entre 350 millions pour le compte foncier logement et 50 millions pour la foncière pour le logement abordable. Seul un haut niveau de mobilisation municipale nous permettra de créer les 4000 logements sociaux par an ainsi que les 4000 logements abordables par an inscrit dans notre stratégie logement.
Mais l’investissement public c’est aussi agir pour la transition environnementale par la création de nouveaux espaces verts, la modernisation de notre patrimoine, l’embellissement de nos rues et de nos jardins. C’est, enfin, la création de nouveaux équipements publics municipaux de proximité dans chaque arrondissement qui doit passer par un doublement du compte foncier « équipement » pour atteindre les 50 millions €. En effet, en matière de sport, de culture, de santé, de jeunesse, de places en crèche et dans les EHPAD, etc, les besoins restent encore considérables pour les parisiens et parisiennes, en particulier dans les quartiers les plus populaires.
Mes chers collègues, à quelques semaines d’une discussion budgétaire, il me semble indispensable de rappeler le poids et le rôle des collectivités dans notre pays. Nous l’avons prouvé tout au long des crises successives : les collectivités locales font office de bouclier social et environnemental au plus près des habitants. Nous devons pouvoir continuer de développer des politiques publiques de qualité par une véritable autonomie financière. Tel est le message que nous souhaitons faire passer aux parisiennes et parisiens : Paris est et restera une ville protectrice.