Voici enfin venu le temps de la débaptisation de l’avenue Bugeaud dans le 16ème arrondissement Beaucoup l’attendaient, beaucoup la demandaient. Notamment, parce que Thomas Robert Bugeaud est une figure notoire de la colonisation de l’Algérie par la France au 19ème siècle. Artisan majeur, dès 1836 sous la monarchie de Juillet, dans la conquête de l’Algérie préambule à la recomposition d’un empire colonial français.
Mais à quel prix ce projet impérialiste et colonisateur a pu rencontrer le succès qu’on lui connaît, si ce n’est en usant de modes opératoires redoublant de cruauté, dans l’objectif d’anéantir de spolier et d’humilier les populations locales : razzia, aménagements de douars pour mieux y exploiter ses habitant·es, expropriations, destruction des villages et massacres.
Mettant en oeuvre la politique de la terre brûlée Bugeaud se vantait de pratiquer les « enfumades » lorsqu’il s’agissait d’asphyxier les résistant·es qui quittaient leurs villages et se réfugiaient dans des abris naturels.
Mais Bugeaud dans son rôle de bourreau ne s’est pas cantonné qu’à l’Algérie. Jouissant également d’une réelle impopularité à Paris lorsqu’il fut missionné pour écraser l’insurrection de février 1848. Il en fut écarté par Louis Philippe craignant que Bugeaud n’attise un peu plus la haine des insurgé·es. Nous communistes de Paris pensons que les tenants d’un passé funeste, auteurs de massacres et de ce qui s’apparenterait aujourd’hui à des crimes de guerre, ne méritent plus d’avoir leurs noms inscrits dans l’espace public parisien.
Cette situation nous astreint à un travail exigeant d’observations des noms qui baptisent nos espaces et équipements publics. Pour porter une analyse critique rigoureuse des noms qui charrient avec eux des inégalités systémiques et structurelles inhérentes aux héritages historiques de l’esclavage, du racisme, du colonialisme et de l’impérialisme. Cette tâche est juste et nous incombe, par respect pour les générations futures.
Mais jamais elle ne doit nous départir de notre rôle de promoteur du débat public sur ces héritages plus que jamais contestés. Notre rôle est bien de continuer à expliquer les traces de notre histoire. Bugeaud est un des premiers noms dont nous devons tous·tes assumer la débaptisation ce qui nous permettra de rendre ici un hommage ému à Hubert Germain, ancien résistant, compagnon de la Libération et ministre décédé en 2021.
Hubert Germain, dernier des hommes à avoir combattu sous le drapeau de la croix de Lorraine des Forces françaises libres (FFL) inhumé au mont Valérien aux côtés des résistants fusillés par les nazis. Hubert Germain qui dès la mi-juin 1940, au moment où il passe le concours de l’École navale de l’Armée française, alors que les allemands entrent dans Paris, décide de rendre copie blanche pour ne pas avoir à servir dans une armée aux ordres de l’ennemi. Hubert Germain qui refuse l’armistice de juin 1940 et rejoint les rives anglaises pour continuer le combat.
Mes chers collègues, plus que jamais, dans un contexte de montée de l’extrême droite, choisir de mobiliser notre mémoire collective au profit de cet homme, de son engagement dès la première heure face au fascisme, de son combat est un acte fort qui fera date. En tant que communistes nous prenons nos responsabilités. Nous en sommes fier·es.