Madame la Maire, chers collègues et chers membres de la convention citoyenne.
Le débat à propos de la Seine que nous avons eu en février se prolonge avec vos travaux autour de la pertinence ou non d’une éventuelle attribution de personnalité juridique.
Avant d’évoquer les conclusions de vos travaux je souhaiterai réagir à la forme. Comme indiqué dans cet avis, la quasi-unanimité des membres regrette que la Convention n’ait pas été plus longue. Plus de la moitié estiment la problématique trop vaste au regard du temps qui leur a été accordé. Dix-neuf personnes sur quarante-huit, se déclarent réservées sur l’intérêt de créer une personnalité juridique de la Seine, estimant ne pas avoir eu les informations contradictoires nécessaires. Je pense que cela témoigne que cette proposition ne fait pas l’objet d’un vaste consensus.
Enfin, parmi les 26 témoignages, l’un d’entre eux m’a interpellé, je le cite : « Le véritable exercice de la démocratie aurait mérité de nous présenter des experts qui proposent des solutions alternatives ». Je pense que dans ce témoignage et dans les conditions décrites précédemment on pointe une véritable limite à ces travaux et à ce débat. Parce qu’un exercice démocratique ne doit pas simplement consister à demander aux citoyens de répondre à une question pré-établie mais bel et bien à déterminer l’objet de la question selon leurs préoccupations puis d’y répondre selon l’intérêt général en ayant pu évaluer plusieurs voies.
Enfin pour ma part je ne suis pas juriste et je ne saurais être catégorique sur la nécessité ou non d’accorder une personnalité juridique à la Seine. Par ailleurs, la Seine n’est pas qu’une réalité parisienne puisqu’elle concerne 4 régions, dès lors une telle réflexion aurait pu mériter une autre échelle, comme l’indique d’ailleurs cette convention qui évoque la possibilité d’un débat national. Concernant l’attribution d’une personnalité juridique, cette initiative semble sous-estimer la portée actuelle du code de l’environnement et la possibilité pour les associations de bénéficier d’un droit d’action en justice. Ce sont d’ailleurs des éléments que mon collègue Jean-Noël Aqua avait évoqué lors de notre débat de février.
Pire encore, cela pourrait donner l’illusion d’une protection renforcée puisqu’elle n’apporte aucune réponse aux problèmes pour le coup très « matériels » : les sous-effectifs des services, d’inspection, de manques de moyens techniques, d’engorgement des tribunaux, la non-application de certains textes etc. D’ailleurs les membres de la convention en sont conscients puisqu’ils s’interrogent sur la remise en cause du fonctionnement de l’OFB, qui je le rappelle est l’œuvre de la droite. Je pense notamment à Laurent Wauquiez qui ne masque pas son hostilité à l’égard de la police de l’environnement. Cette même droite qui par, la voix de Rachida Dati, déjà Ministre de la culture à l’époque, se moquait de l’argent engagé par notre collectivité dans la dépollution de la Seine. Résultat, les parisiens pourront se baigner dans la Seine, et surtout : cette dépollution a permis de recenser 36 espèces de poissons dans la Seine contre 10 en 1970.
Nous avons d’ailleurs déposé un vœu portant sur la systématisation de la régie publique dans la gestion des piscines et la sécurisation des nouveaux sites de baignade naturelle. Nous demandons la présentation au prochain conseil du plan de sécurisation de ces baignades naturelles, ainsi qu’une étude ayant trait à la possible remunicipalisation des piscines aujourd’hui gérées en DSP. En ce sens, nous demandons aussi à ce que la piscine de Château Landon soit gérée en régie. Pour en revenir à la Seine, j’ajouterai que bien d’autres obstacles s’opposent à la préservation d’espaces naturels. Et pour le coup, je salue là encore la réflexion de cette convention citoyenne qui fait un pas dans ce sens.
Premièrement, quand vous indiquez que la Seine n’est la propriété de personne et aussi lorsque vous rappelez que l’accessibilité des bords de Seine est souvent entravée par des privatisations. Ensuite lorsque vous soulignez qu’il faut contrôler le développement des monopoles pour éviter qu’un acteur puisse, seul, édicter les règles. Et enfin quand vous dites que les intérêts économiques, que je qualifierai d’intérêts capitalistiques, sont largement favorisés par les entreprises et l’Etat au détriment de la biodiversité et en fait de l’intérêt général.
Dans ce cadre le véritable levier pour protéger la Seine c’est d’agir en amont pour obtenir des changements fondamentaux en encadrant à la source les activités économiques comme les industries présentes le long de la Seine ainsi que les activités agricoles. La protection juridique ne vient qu’en aval, une fois les dégâts causés car les effectifs réels et les contrôles manquent.
Ces changements fondamentaux passeront par plus de pouvoir pour les salariés dans les entreprises et les différentes activités économique, pour que la citoyenneté ne s’arrête pas à la porte de l’entreprise. La protection des écosystèmes entrera forcément en contradiction avec le capital et sa logique inhérente de quête du profit : coûte que coûte. Je vous remercie.