Dans le sport, les sportifs savent qu’il n’y a pas de victoires sans un entraînement de longue haleine. En politique, c’est la même chose. Il n’y a des victoires que si elles sont précédées de longues luttes.
Depuis maintenant plus de 40 ans, une lutte est engagée pour la reconnaissance de cette grande sportive et féministe. C’est Jane Renoux qui se saisit la première du sujet. Elle a le double avantage d’être membre du PCF et d’être l’une des premières journalistes sportives féminines. Elle publie avec Annick Davisse et Léo Lorenzi un ouvrage consacré à l’histoire des femmes dans le sport depuis l’antiquité au sein duquel Alice Milliat a toute sa place.
Je tiens particulièrement à rendre hommage à Jane pour son travail précurseur sur Alice Milliat, pour son militantisme pour la place des femmes dans la presse et les médias, et pour son parcours de première femme journaliste à la rubrique sportive de l’Humanité qui a pris fin trop tôt avec sa disparition en 1999.
Depuis, la lutte a continué.
La lutte, d’abord, pour la place des femmes dans le sport avec le travail de Marie-George Buffet au ministère de la jeunesse et des sports. Je tiens également à lui rendre hommage, à sa force, à son courage, à ses combats, alors qu’elle a fait le choix de quitter l’assemblée nationale.
La lutte pour la reconnaissance d’Alice Milliat n’a pas cessé non plus. En 2005, André Drevon consacre un ouvrage à la vie de cette grande sportive. C’est dans ses pas que nous souhaitons nous inscrire en prolongeant la lutte pour Alice Milliat.
Car il s’agit en fait d’un double hommage. Un hommage, d’abord, à la sportive. Alice Milliat est la première femme à remporter le brevet Audax rameur en effectuant une course d’aviron de 80 kilomètres sur la Seine. Elle s’est par ailleurs illustrée dans d’autres disciplines par la suite.
Mais un hommage, surtout, à la militante féministe.
En 1919, elle a 35 ans lorsqu’elle devient présidente de la fédération des sociétés féminines sportives de France. A la sortie de la première guerre mondiale, elle fait partie de ces femmes qui ont participé à l’effort national et qui réclament à juste titre plus de reconnaissance dans tous les domaines de la vie. Elle s’engage pour que les femmes puissent concourir, tout comme les hommes, aux Jeux Olympiques.
A défaut, elle organise les premiers jeux mondiaux féminins au Stade Pershing à Paris en août 1922. Quatre éditions de ces jeux ont lieu entre 1922 et 1934 à Paris, Göteborg, Prague et à Londres : ils réunissent des milliers de spectateurs. Le succès est tel que le Comité International Olympique finit, en 1928, par autoriser les femmes à participer au sport roi des Jeux Olympiques : l’athlétisme. Alice Milliat est la première femme membre du jury de ces épreuves. C’est une grande victoire pour la reconnaissance des femmes dans le sport.
100 ans après les premiers jeux mondiaux féminins, le combat de Alice Milliat est toujours d’actualité. Faute de volonté politique, le chemin est encore long pour l’égalité entre les femmes et les hommes dans notre société, mais aussi dans le sport. La réhabilitation de Alice Milliat est malgré tout en marche, grâce à la volonté de personnalités du monde du sport et de militants.
Alors que sa tombe était anonyme jusqu’en 2020, ses descendants ont apposé une plaque face à la notoriété grandissante de son histoire. En 2021, le Comité National Olympique et Sportif a installé une statue à son effigie à la maison du sport français, à côté de la statue de Pierre de Coubertin. Par le vœu que nous déposons, nous souhaitons renforcer cette reconnaissance encore insuffisante. Nous proposons que sur l’esplanade Alice Milliat soit installé un monument en hommage à la pratique sportive féminine afin de donner du sens à ce lieu qui aura vocation à accueillir de grands événements sportifs.
Nous proposons également de célébrer à l’automne, en lien avec les clubs et les fédérations sportives, les 100 ans des premiers jeux mondiaux féminins qui ont eu lieu la première fois en 1922. Enfin, nous souhaitons qu’à l’occasion de la cérémonie d’ouverture des Jeux Olympiques et Paralympiques 2024 qui aura lieu sur la Seine, un hommage soit rendu à Alice Milliat et qu’un prix sportif soit créé à cette occasion.