Depuis la défaite de l’Arménie et l’annexion du Haut Karabagh en 2023, le premier ministre arménien Nikol Pachinian tente de négocier, avec très peu de cartes en main, le futur de son peuple et des quelque 150 000 réfugiés de la région. En face, Ilham Aliyev, président de l’Azerbaïdjan, ne fait que multiplier les effets de manche diplomatiques. Il ne négocie que dans un seul intérêt : le sien.
En outre, la déclaration azérie-arménienne, célébrée le 8 août dernier en grande pompe chez un Donald Trump se frottant les mains en est la preuve. Une chose est claire : ce traité de paix n’en a que le nom. Il entérine notamment la création d’un corridor reliant l’Azerbaïdjan au Nakhitchevan, sobrement intitulée « la route Trump pour la paix et la prospérité internationales ». Incluant des infrastructures ferroviaires, routières, énergétiques et numériques, le corridor est une aubaine pour tous : l’Azerbaïdjan, la Turquie, son “allié naturel”, et les États Unis. Pour tous, oui. Sauf pour l’Arménie elle-même, une fois de plus spoliée et dont l’intégrité territoriale est menacée.
Ce que l’accord ne mentionne pas en revanche, c’est le droit au retour des Arméniens du Haut-Karabagh, contraints à l’exil après l’exode massif de 2023, ni la protection de leur patrimoine culturel et religieux, toujours plus menacé. Bien au contraire. Ilham Aliyev conditionne aujourd’hui la signature définitive de l’accord à la suppression, dans la Constitution arménienne, de toute référence au Haut-Karabagh.
Cette invisibilisation culturelle et politique ajoutée à la crise humanitaire majeure causée par le conflit constitue une humiliation supplémentaire pour l’Arménie. Mais cette humiliation est aussi la nôtre, car c’est celle des organisations internationales qui ont failli à protéger ce pays en faisant respecter le droit.
En février dernier, le conseil de Paris avait apporté son soutien aux 16 prisonniers arméniens encore détenus à Bakou, dont certains sont d’anciens responsables du territoire contesté. Leur sort reste un non-sujet pour l’Azerbaïdjan, mais Paris ne les oublie pas. Nous n’oublions pas non plus les 150 000 réfugiés du Haut Karabagh, expulsés et maintenus dans un état de faim et d’errance indicible par Ilham Aliyev. C’est pourquoi cette délibération est précieuse.
Mme Dati les a, en revanche, bien vite oubliés. Ses accointances avec le régime azerbaïdjanais sont de notoriété publique… tout comme sa convocation devant le tribunal correctionnel pour corruption et trafic d’influence le 16 septembre 2026.
Les intérêts des uns font la misère des autres, et le rapport de force entre l’Azerbaïdjan et l’Arménie reste cruel. Quelques jours à peine après la déclaration et en totale contradiction avec les promesses d’apaisement qui accompagnaient l’accord, le président azerbaïdjanais a qualifié l’Arménie d’« ennemie » dont la société est « malade ». Dans la foulée, Aliev a également annoncé une future augmentation du budget militaire azéri.
Depuis ses débuts, l’alliance turco-azérie a provoqué des déplacements forcés, des emprisonnements iniques et une instabilité régionale patente en exacerbant les tensions nationalistes. Exaucer son vœu et accepter que le Haut Karabagh soit rayé de la carte au sens propre comme figuré reviendrait à hypothéquer tout avenir de paix dans la région.
Une paix juste et durable naît du respect des droits fondamentaux des peuples, pas sur la spoliation et la persécution. La France, ainsi que les États membres de l’ONU et de son Conseil de sécurité, doivent assurer une protection internationale aux Arméniens, et poursuivre les efforts diplomatiques en ce sens. Une fois encore et aussi longtemps qu’il le faudra, notre groupe assure à l’Arménie et aux réfugiés du Haut Karabagh son plus grand soutien.