"Les Amis de la Commune" seront contents de savoir qu’ils ne sont qu’une antenne de notre Parti Communiste, peut-être même notre bras armé.
Monsieur GRANIER, vous avez fait de la provocation, comme l’annonce de l’inscription en cet anniversaire du Sacré-Coeur aux monuments historiques. Elle a été mal perçue parce qu’annoncée justement pour cet anniversaire. Permettez-moi, Monsieur GRANIER, je préfère parler du fond. C’est cela qu’en fait vous ne supportez pas.
En janvier 1871, les murs de Paris se remplissaient d’affiches rouges brandissant "place au peuple, place à la Commune". Les Parisiens et les Parisiennes se soulevaient en mettant en place une forme inédite de gouvernement démocratique. La Commune de Paris naissait et allait durer 72 jours.
72 jours pendant lesquels s’instaurait la révolution la plus moderne, la plus large et la plus féconde de toutes celles qui ont illuminé l’histoire, pour reprendre les termes de Communards.
72 jours pendant lesquels les femmes sont devenues des héroïnes dont l’héritage actuel est encore fort, pour lesquelles l’héritage actuel est encore fort. Madeleine Pelletier, Blanche Lefebvre, et l’éternelle Louise Michel, autant de noms qui résonnent encore aujourd’hui.
72 jours qui ont permis l’émergence d’une république sociale ou pêle-mêle sont proposés la reconnaissance de la citoyenneté pour les étrangers, l’égalité du salaire entre les femmes et les hommes, la réquisition des logements vacants pour les sans domicile, la réquisition des entreprises abandonnées et la création de coopératives ouvrières, l’école, la justice gratuite, et pour la première fois, la reconnaissance de l’union libre et les enfants nés de couples dits illégitimes, la séparation de l’Eglise et de l’État.
72 jours d’avancées sociales réprimées de manière sanglante et sanguinaire par le Gouvernement pour servir les intérêts capitalistes de grands industriels.
150 ans plus tard, ces avancées sont encore autant de graines que les descendants politiques dont nous sommes continuent de faire pousser. Ce travail collectif, cette expérience d’autogestion par et pour le peuple, cet esprit vivace, nous devons continuer de nous en inspirer et de les faire vivre comme a su le faire la seconde république espagnole qui fête les 90 ans de son instauration cette année.
Si la Commune de Paris a su émerger dans un contexte extraordinaire en pleine guerre franco-allemande et dans une ère industrielle portée par des logiques capitalistes créant des fractures sociales béantes, le contexte actuel l’est tout autant, extraordinaire.
La crise du Covid que nous subissons depuis près d’un an avec son lot de conséquences économiques et sociales majeures, l’inexorable lutte contre un virus qui conditionne nos existences et nous épuise autant individuellement que collectivement, autant physiquement que moralement, se combinent à une longue crise démocratique.
La République moribonde dans laquelle nous évoluons et qui répond à un état d’exception banalisé au nom de la lutte cumulée contre la pandémie et contre le terrorisme, propose toutes les caractéristiques d’un soulèvement populaire.
Ces besoins de liberté dont se font l’écho les mobilisations contre la sécurité globale doit nous interpeller. Ces libertés et ces avancées initiées par la Commune, nous devons les chérir, les brandir et les défendre aujourd’hui encore plus.
Bon nombre des rêves du peuple de Paris de 1871 se sont réalisés depuis 150 ans, mais il reste encore des Bastille à prendre. Notre groupe continue de les porter au sein de cet hémicycle comme dans la rue, avec différents acteurs et actrices associatifs, syndicaux, et l’ensemble des Parisiennes et Parisiens mobilisés.
Les propositions fortes qu’apportait et concrétisait le peuple de Paris pendant ces 72 jours ne sont pas éloignées de celles que notre groupe porte au sein de notre hémicycle. Pour notre part, nous sommes fiers de prolonger leur lutte, de les donner à voir et à connaître, de nous en inspirer.
Mais laissons la parole à Jean-Baptiste Clément, auteur du "Temps des cerises". Deux mois avant la semaine sanglante, il écrivait dans "le Cri du peuple" du 24 avril 1871 : "Supposons que le peuple soit vaincu. Supposons que les bonapartistes ou les royalistes entrent dans Paris en barbotant dans des mares de sang et en piétinant sur des cadavres. Que restera-t-il de la Commune ? Des décrets sur les murs, des affiches qu’on déchirera, répondent ceux qui ne voient pas plus loin que le bout de leur nez.
Ah ! Vous vous trompez. Quand bien même ces décrets n’auraient pas reçu leur pleine exécution, quand bien même vous déchireriez toutes les affiches, quand bien même vous passeriez tous les murs à la chaux, vous ne parviendriez pas à enlever de nos esprits les principes qu’ils ont affirmés. Vous n’empêcheriez pas que le peuple ait senti la différence qu’il y a entre les gouvernements de Versailles et les membres de la Commune. Vous n’empêcheriez pas que le peuple ait vu là le salut des travailleurs et l’avenir du monde."
Aujourd’hui, ce projet de délibération, en proposant qu’une plaque commémorative aux élus de la Commune soit apposée dans chaque arrondissement à l’occasion de ce 150e anniversaire, nous permet, à travers leurs noms, de contribuer à la mémoire vivante de la Commune, comme l’incroyable et riche programme des nombreux événements culturels et festifs qui vont jalonner ces plus de deux mois d’anniversaire.