Le monde de la culture est l’un des secteurs les plus touchés par la crise sanitaire liée au Covid-19. Vous m’excuserez donc d’élargir mon propos au-delà du contenu du projet de délibération lui-même, projet de délibération que nous approuvons bien entendu. La profondeur et la durée de la crise du secteur culturel, révélée par le virus et le nombre de personnes impactées, nécessiteraient une véritable planification plutôt que de multiples aides sectorielles difficilement lisibles et très favorables aux institutions culturelles à forte attractivité et au rayonnement international.
Or, l’héritage historique de l’exception française nous oblige. Elle nous oblige à valoriser la création artistique et culturelle dans toute la diversité et la richesse de ses formes, de ses modes de diffusion et d’expression, et non de s’enquérir du seul rayonnement des lieux culturels de prestige, souvent associés à l’excellence artistique. Les mondes du livre et du cinéma, les salles de spectacle et les festivals font donc l’objet d’un plan de relance spécifique, comme l’a encore rappelé la Ministre de la Culture ce week-end, aux États généraux des Festivals à Avignon.
Le budget culture augmente de 5 %, mais reste à savoir si l’ensemble de ces aides, de l’exonération de charges et les prêts garantis par l’Etat suffiront à aider ce secteur qui navigue à vue, sans date butoir ni plan précis.
Si l’on prend simplement l’exemple du soutien de 50 millions d’euros destinés à compenser les pertes d’exploitation liées au Covid, on voit qu’en sont exclues l’ensemble des salles de cinéma publiques au titre qu’elles dépendent des collectivités territoriales. Que l’Etat ne soutienne plus les salles déjà subventionnées, c’est une première historique, puisque jusqu’ici, toutes les aides à l’exploitation étaient accessibles à tous, quel que soit le statut économique ou juridique.
Les cinémas publics ont un rôle particulier, ils en sortiront affaiblis, et pourtant, la diversité du cinéma ne passe que par la diversité des cinémas. Ces aides sont malgré tout essentielles, tout comme l’ont été l’action de la Ville, dès le déconfinement, avec notre plan de soutien de 15 millions d’euros au secteur culturel sinistré et l’adaptation de l’offre culturelle parisienne estivale, au travers d’"Un été particulier" qui a connu un franc succès.
Toutes ces mesures sont indispensables pour la survie du monde culturel. Mais il y a un aspect sur lequel il nous faut impérativement nous pencher, celui de l’emploi culturel, et en particulier, des intermittents du spectacle qui feront figure de victimes de la crise du Covid.
Depuis le confinement, leur baisse d’activité atteindrait près de 80 % en moyenne. L’impossibilité de déclarer ses 507 heures pour obtenir le sésame devient une réalité pour de trop nombreuses personnes. Nous devons nous saisir collectivement de ce problème et rappeler l’importance de déclarer l’année blanche pour ces travailleurs souvent précaires, et de plus en plus nombreux dans les files d’attente des bénéficiaires du Secours Populaire.
Rappelons que, selon l’I.N.S.E.E., ce secteur représentait en 2018 près de 2,3 % du P.I.B. et générait 670.000 emplois, soit 2,5 % de la population active. Dans la mesure où notre région comptabilise plus de 40 % des intermittents du spectacle au niveau national, nous devons leur porter un œil attentif et œuvrer auprès de l’Etat à une véritable prise en compte non seulement de la sauvegarde de ce statut, mais surtout à ne laisser personne sur le bord de la route. Sans oublier les étudiants en art qui ont achevé leur formation en juin, souvent dans des conditions rocambolesques, sans pouvoir présenter leurs projets, et qui sont aujourd’hui en recherche d’un impossible stage en alternance pour finaliser leur cursus ou d’un emploi dans un secteur suspendu aux arrêtés préfectoraux.
De notre côté, nous considérons qu’il y a des leviers à lever pour financer un plan de soutien à la culture plus vaste encore, en faisant contribuer les immenses profits des G.A.F.A.M. et en créant des aides fléchées, par exemple vers l’emploi dans le secteur culturel.
Je vous remercie.