Madame La Maire,
Vous l’avez sans doute entendu comme moi, dans le cadre de la campagne des régionales en Ile-de-France, Marlène Schiappa a annoncé le jeudi 20 mai, vouloir créer un lieu de repos pour les coursiers à Paris… C’est oublier que l’incurie du gouvernement dont elle fait partie nous a déjà conduit à élaborer un tel projet, la Maison des coursiers, qui inspire déjà de nombreuses villes de France.
Avec l’AMLI (l’association pour l’Accompagnement, le Mieux-être et le Logement des Isolés) et Coocpcycle, que je tiens à remercier chaleureusement pour leur formidable investissement, nous travaillons depuis des mois sur ce projet, qui devrait ouvrir ses portes en septembre. La MC entend apporter de l’aide aux livreuses et aux livreurs des plateformes, une population de travailleurs jeunes, hyper paupérisés, qui après avoir livré pizza, bobun et autre burger, sont de plus en plus nombreux à rejoindre les files d’attente de l’aide alimentaire, pour beaucoup sans papier et victimes de racisme. On pense évidemment ce sms immonde envoyé à un livreur ; ou encore au minable guet-apens xénophobe dont un coursier a été victime pas plus tard qu’hier. On ne peut pas accepter un tel projet de société…
Les contraintes budgétaires et la situation d’urgence sociale et économique dues à la crise ont cependant conduit à réduire temporairement les objectifs de cette maison à sa dimension d’aide sociale. Car si l’AMLI a généreusement accepté de l’héberger et à titre gratuit, la solution est temporaire et implique un partage de l’espace qui ne permet pas à la MC de déployer pleinement ses projets d’aide juridique, sociale et syndicale, ses projets de refuge et d’espace collectif, avec douches, sanitaires, et organisation de permanences à des horaires larges et adaptés. La ville et ses services doit prendre sa part et proposer de solutions d’hébergement pérennes,
Je suis convaincue que Paris, en tant que capitale, que ville-monde, que ville de gauche doit montrer l’exemple dans le combat à mener contre l’ubérisation de notre société. Paris peut faire la différence. Pour ce faire, nous sommes convaincus que la plateforme ACHETER A PARIS pourrait beaucoup aider à l’émergence et au renforcement des solutions alternatives au capitalisme de plateformes qui broient les travailleurs précaires. Ce projet, voté également par ce Conseil, qui a attiré l’attention de bien d’autres villes, doit enfin voir le jour. Et il doit être porté par des acteurs de l’ESS, dans le respect du droit social et de l’environnement, pour favoriser notamment les produits « fabriqués à Paris », et réduire le recours aux plateformes socialement et écologiquement problématiques telles qu’AMAZON.La diversité de commerces parisiens peut largement répondre aux besoins de nos habitantes et habitants .
Or la plateforme AP est en souffrance depuis aujourd’hui 8 mois. Pourtant, comme la MC, elle est très attendue par de nombreux acteurs, notamment de l’ESS, qui sont d’ores et déjà prêts à travailler avec nous. Il s’agit d’un projet audacieux, combatif, d’avant-garde, porteur d’une vision alternative de l’économie, un projet qui propose activement des solutions pour un monde meilleur. Et la crise sanitaire a révélé à plus d’un titre combien nous en avons besoin.
Il est donc urgent d’agir et de ne plus remettre à plus tard.
Pourquoi ne pas créer un groupe de travail au plus vite pour permette le démarrage de ce projet digne du Paris ville monde, pour rencontrer les acteurs de l’ESS dont le projet clef-en-main pourrait nous permettre un développement rapide de la plateforme ?
Qu’attendons nous pour proposer une réelle alternative à laquelle répond la Maison des coursiers et sortir de la précarité les trop nombreux travailleurs ubérisés ?
Tout le monde nous regarde Madame la Maire, alors montrons au monde quoi la Ville de Paris est capable.