Il y a quelques jours, le 29 janvier, s’est tenu à Grigny le "Comité interministériel à la ville", qui ne s’était pas réuni depuis 8 ans. L’appel de 200 maires de tous bords politiques, dit "appel du 14 novembre", a obligé le Gouvernement à prendre en compte l’ampleur de la dégradation sociale dans les quartiers prioritaires de la ville, où le Covid-19 a aggravé les inégalités. Les annonces du Premier ministre sont loin d’être à la hauteur des demandes des maires. C’est pourquoi cet avenant au contrat de ville parisien est l’occasion pour nous d’actualiser et de renforcer nos engagements. Dans les quartiers populaires, de plus en plus de "frigos" sont vides à la fin du mois. Nombre d’associations "politique de la ville" ne sont pas restées, certes, les bras croisés pendant l’année 2020 face à la précarité alimentaire et à la détresse de leurs bénéficiaires. Elles ont réorienté dans l’urgence leurs actions pour répondre à ce besoin de plus en plus prégnant. Nous saluons donc l’intégration de cette dimension dans le contrat de ville.
La crise sanitaire nous invite également à revoir notre politique en matière de santé. Les quartiers populaires parisiens sont ceux où le non-recours aux soins est le plus important. Les centres municipaux de santé prévus pendant la mandature devront l’être prioritairement dans ces quartiers, où il est indispensable de renforcer l’offre de secteur 1. Nous voyons au quotidien les limites d’une politique de santé centrée sur le curatif. C’est bien d’une politique municipale préventive et proactive dont les Parisiens ont besoin, associant les médecins des centres municipaux de santé et les ateliers santé ville, dans une dimension d’accès aux droits et d’aller vers.
Sur la question de l’enjeu environnemental, les Parisiennes et les Parisiens vivant dans les quartiers prioritaires sont souvent les premières victimes de la pollution. Les Parisiens et les Parisiennes les plus précaires sont les premiers à vivre dans les logements insalubres, véritable passoire énergétique, faute de moyens suffisants pour se loger dignement dans le parc privé. Les bailleurs sociaux sont signataires de ce contrat de ville et nous devons poursuivre le travail commun pour mobiliser tous les leviers disponibles : préemption, transformation de bureaux en logements, mais aussi construction pour développer et rénover le logement public digne à Paris. Alors que la crise sociale s’inscrit dans la durée, nous devons également accentuer le travail de prévention des expulsions locatives, renforcer le partenariat entre les bailleurs sociaux et les C.A.S.V.P. pour prendre le plus tôt possible, dès les premiers impayés de loyer, des mesures adaptées à chaque situation.
Le travail avec les bailleurs se fait également en lien avec l’exonération de la taxe foncière sur les propriétés bâties. Les montants en jeu ne sont pas négligeables. L’enjeu est de taille et la mobilisation de ces crédits doit se faire dans une démarche partenariale, en écho aux enjeux du contrat de ville. Pour valoriser leur contribution, faire connaître le travail réalisé, peut-être les bailleurs pourraient-ils présenter les actions financées dans ce cadre à l’occasion des comités de pilotage annuels de la politique de la ville ? Car la politique de la ville, ce sont, bien sûr, des moyens renforcés, mais c’est aussi et avant tout un travail partenarial qui permet de répondre dans l’urgence et sur le temps long aux problématiques posées.
Parmi ces problématiques, il y en a une que nous évoquerons lors de ce Conseil à plusieurs reprises, qui est la problématique des rixes. Loin des anathèmes et des malheureuses instrumentalisations politiques, cette question des rixes nécessite l’implication des bailleurs pour proposer en urgence des mutations aux victimes de rixes craignant les représailles, la "Mission Locale", pour proposer des solutions aux jeunes désoeuvrés dans l’espace public, mais aussi les équipes de prévention spécialisées, en particulier dans les lieux de forte affluence de la jeunesse. Les rixes entre bandes ne sont pas nouvelles, depuis les Apaches aux blousons noirs. Elles sont liées à de multiples facteurs, qui impliquent une vision à la fois large intégrant les dimensions d’emploi, de jeunesse, de prévention, de logement, et une dimension fine prenant en compte la spécificité de chaque territoire, de chaque quartier, et je dirai même de chaque hall d’immeuble. C’est le sens même de la politique de la ville qui est à même de se saisir, en lien, bien sûr, avec la prévention, de l’ensemble de ces enjeux. Je vous remercie.