Monsieur le Maire, mes chers collègues,
J’aimerais profiter de la présentation de ce voeu pour évoquer ici quelques éléments d’histoire de la participation citoyenne, sujet si cher au groupe Communiste et Citoyen.
Je ne sais pas si vous le saviez, mais la première ville qui a mis en oeuvre un budget participatif de façon accomplie, c’est Porto Alegre, au Brésil, en 1989 ; il se développe ainsi dans un contexte de démocratisation du Brésil après la dictature militaire. Cette mise en oeuvre est le résultat d’un dialogue entre le gouvernement municipal, les associations des quartiers défavorisés et des intellectuels, qui a abouti à la conception d’un nouvel outil de démocratie participative.
La force de ce projet réside par ailleurs dans l’organisation très procédurale de la participation des citoyennes et des citoyens. Il fallait construire des dispositifs qui permettent de s’assurer que la voix des habitantes et des habitants issus des quartiers les plus défavorisés puisse émerger, qu’elle permette d’exprimer leurs besoins réels, les besoins des quartiers populaires qui n’avaient pas forcément été identifiés par les autorités comme prioritaires. Je pense à la construction d’écoles, au tout-à-l’égout, aux routes bitumées aussi.
Dans les années 2000, la France va s’inspirer de l’expérience de Porto Alegre dans une quinzaine de villes initialement communistes, il faut bien le dire, comme Saint-Denis, Bobigny ou encore Morsang-sur-Orge.
A Paris, le budget participatif a été lancé en 2014. Plus de 40.000 Parisiennes et Parisiens ont voté pour 9 projets sur une liste de 15. C’est le thème, pour l’anecdote, de la Nature en ville, qui a remporté la première opération, pour information. En 2019, on compte plus de 430 projets déposés au budget participatif. L’écart entre ces deux chiffres témoigne du succès de ce dispositif. Problème, seuls 8 % des Parisiens et des Parisiens votent pour les projets lauréats. Le travail n’est donc pas terminé.
Le budget participatif est un réel exercice de démocratie. Il permet de renforcer la citoyenneté en permettant aux habitantes et aux habitants d’être associés à la définition des finances publiques. Cet exercice nécessite un dialogue entre les élus, les habitantes, les habitants et les différents acteurs impliqués localement. Nous pensons que le risque majeur lié à la démocratie participative est que les citoyennes et les citoyens ne se sentent pas vraiment consultés, pas vraiment impliqués. Des explications doivent donc être données à l’ensemble des citoyennes et des citoyens pour qu’elles et ils se sentent vraiment actifs, réellement intégrés dans ce dispositif, et c’est le sens des amendements que nous avons déposés.
Le budget participatif permet de donner concrètement, directement la parole aux citoyennes et aux citoyens, d’accompagner les idées des habitantes et des habitants, de leur proposer un suivi de la construction vers la réalisation de leurs projets. Or, dans la mandature précédente, certains projets n’ont pas pu être réalisés, d’où la nécessité d’un réel dialogue avec les directions et les services techniques, en amont, pour que les porteuses et les porteurs de projets ne se retrouvent pas écartés une fois que le projet est voté.
Il est également essentiel de faire connaître ce dispositif, de communiquer sur ce budget participatif, afin que le plus grand nombre s’implique. Au regard de la charte qui nous est présentée, notre groupe s’interroge sur les nouveaux dispositifs qui vont être mis en place pour favoriser la participation, notamment dans les quartiers populaires.
C’est pourquoi nous demandons que des moyens supplémentaires soient mis en place dans les quartiers populaires, pour que les actions et les animations en lien avec le budget participatif soient pérennes et permettent un véritable suivi des projets. Nous demandons donc un renforcement des effectifs au sein du service du budget participatif, au service "politique de la ville" pour permettre un accompagnement solide des habitantes et des habitants, de la phase d’idéation à la réalisation des projets votés. Surtout, nous le savons, les personnes que nous retrouvons lors des réunions et qu’on continue à retrouver par la suite sont généralement parmi les plus politisées ou déjà engagées dans la vie de leur quartier, des citoyennes et des citoyens investis et aguerris sur les questions de démocratie. Favoriser la participation des personnes qui sont les moins familières de ces mécanismes, c’est un enjeu crucial pour ce nouveau budget participatif.
Comment dépasser, justement, la surreprésentation des catégories sociales, des milieux les plus intégrés au processus de décision ? Il faudrait, selon nous, être attentif à renforcer la logique de l’"aller vers", si je puis m’exprimer ainsi, en mettant en place des actions concrètes. Par exemple, en renforçant les missions de la caravane de participation ou en s’appuyant sur les kiosques citoyens qui travaillent avec les acteurs locaux. Bref, il faut appuyer ce type de dispositifs concrets.
Par ailleurs, la charte mentionne l’instauration d’une thématique annuelle. A ce sujet, nous avons une interrogation. Comment cette thématique va-t-elle être décidée ? Nous proposons d’associer les citoyennes et les citoyens à ce choix, pourquoi pas au moment du budget participatif.
Bref, je termine ! Ce budget participatif, il permet de redonner envie de penser la ville aux Parisiennes et aux Parisiens, pas seulement à l’échelle de l’arrondissement, mais à l’échelle de tout Paris. Le budget participatif est un exercice social, et si tous les quartiers sont riches de leur diversité, toutes les personnes qui y habitent aussi, rappelons-le. Alors donnons-leur les moyens de s’interroger et de s’exprimer sur la ville dans laquelle ils souhaitent vivre. Je vous remercie pour votre attention.