Comme vous l’avez relevé, Madame la Maire, oui, quelles que soient les couleurs politiques locales, les collectivités ont leur police municipale, et oui, vous avez raison, des municipalités communistes ont créé ou maintenu leur police municipale. Et c’est fort de leur expérience et des discussions que j’ai pu avoir avec eux que j’en tire les enseignements suivants : tous m’ont confirmé que ces créations entraînaient un retrait de l’Etat dans les missions de sécurité et une augmentation du coût pour leur collectivité. Pour eux, la création d’une police municipale, c’est un constat d’échec, celui de l’Etat qui n’assume plus sa responsabilité dans une mission régalienne.
Aujourd’hui, ces maires me disent qu’ils n’ont pas augmenté les effectifs, qu’ils ont des missions a minima, s’occupant exclusivement des incivilités sur l’espace public. Il n’y a aucune mission de sécurité liée à la délinquance. D’ailleurs, des villes ont choisi de désarmer leur police, comme l’a fait récemment le maire communiste de Villejuif, qui a choisi d’orienter ses dépenses sur les politiques de prévention. Par contre, Madame la Maire, l’ensemble des maires communistes revendiquent d’abord une augmentation des effectifs de police nationale et le retour à une véritable police de proximité.
Nous-mêmes, nous avions débattu en février 2019 et nous avions adopté un vœu des présidents de groupe de la majorité, qui demandait le renforcement des moyens de la police nationale à Paris, le déploiement de la police de sécurité du quotidien, en particulier dans les arrondissements populaires qui en ont le plus besoin, la contractualisation des engagements de l’Etat en la matière avec la Ville de Paris, en s’engageant de façon pluriannuelle sur les effectifs de police dans les commissariats. Qu’en est-il aujourd’hui de ce vœu ? Nous n’avons toujours pas la garantie de l’Etat, et même si, Monsieur le Préfet, vous avez affirmé tout à l’heure le maintien des effectifs, vous ne nous avez pas parlé du renforcement nécessaire de leur présence à Paris. D’ailleurs, à ce jour, nous ne connaissons pas les termes de la convention de coordination qui viendra après le vote de cette police municipale.
La loi pour la sécurité globale théorise d’ailleurs un véritable continuum de sécurités qui valide la place des sociétés de sécurité privées dans le paysage, au même titre que la police nationale et les polices municipales. Ce glissement n’est pas nouveau : Lionel JOSPIN, lors des Assises nationales de la police de proximité, en 2000, pointait la remise en cause du caractère national de la police et de la gendarmerie. Il reconnaissait déjà, avec Jean-Pierre CHEVÈNEMENT, que de nombreuses confusions sur le terrain montraient que l’Etat était largement impuissant dans le cas où des élus locaux ne respectent pas les limites fixées par les conventions de coordination.
Cette confusion n’a jamais cessé et a pris un nouveau tournant après les attentats de 2015 et de 2016. Nous assistons depuis à un élargissement des missions et à une véritable course à l’armement, comme à Marseille ou à Nice, des glissements qui ne répondent pas aux besoins des habitants, comme ceux des quartiers populaires qui déplorent depuis trop longtemps l’absence d’une police de proximité.
Les demandes des Parisiens sont très claires, et on les a dans l’audit de 2019. Ils mettent en tête les incivilités et la saleté, puis les incivilités dans les transports, puis les agressions verbales, puis les phénomènes de bandes, le trafic de drogue et les agressions physiques, le harcèlement sexiste, les agressions sexuelles et, enfin, les vols. Peut-on nous dire sincèrement combien de ces sujets seraient de la compétence d’une police municipale ? C’est vrai pour la verbalisation des incivilités et les nuisances sonores, mais, sur tous les autres points, c’est la compétence de la police nationale ou de la brigade de sécurité dans les transports.
La conclusion de l’audit de 2019 est sans équivoque. A droits constants, prérogatives et moyens constants, il est possible d’améliorer significativement la qualité du service rendu aux Parisiens avec une plus grande polyvalence des agents sans remettre en cause leur statut. Une fusion des statuts à moyen terme pour faire des I.S.V.P. des agents de la police judiciaire adjoints permettrait une plus grande souplesse et une efficacité accrue, sans remise en cause des personnels des administrations parisiennes. En vrai, c’est un renforcement de la DPSP avec, comme boussole, la médiation, la prévention, la lutte contre le racisme, contre la xénophobie et l’antisémitisme, contre l’homophobie, et s’attaquer aux racines du mal, c’est-à-dire d’abord la pauvreté, la déscolarisation, le non-accompagnement des mineurs isolés.
Voilà, Madame la Maire, vous l’avez compris, notre boussole. Ce sont les politiques de prévention, de jeunesse, de santé, qui sont des volets incontournables si nous voulons répondre aux attentes des Parisiens.
Je vous remercie.